Vos données valent 15 Go

Louis Chemineau

Voici ce que vos données vous permettent de vous offrir chez Google : un stockage de 15 Go sur leurs serveurs, tous services confondus. Pour être honnête, il faudrait bien sûr y ajouter les coûts de développement de leurs services, mais le titre serait alors moins percutant. D’autre part, la problématique ne réside pas dans le montant de la contrepartie reçue, mais dans la pratique anticoncurrentielle employée ici, par Google.

Une stratégie bien huilée

Après avoir laissé ses utilisateurs stocker gratuitement des dizaines de Go de photos sur ses serveurs, Google mets fin à sa générosité et limite à 15 Go le volume de données stockées par utilisateur.

Qu’arrivera-t-il alors aux données excédentaires ? Google a précisé qu’il se permettra de supprimer tout surplus sous deux ans.

Similarly, if you’re over your storage limit for two years, Google may delete your content across Gmail, Drive and Photos.

Afin de bien saisir l’aspect intentionnel de ce changement, il faut souligner que Google, et cela depuis 2016, permet aux utilisateurs d’Android de téléverser de manière automatique et illimitée leurs photos sur Google Photos.

Mais cette manœuvre n’a rien d’exceptionnelle. En 2018, Google a annoncé une augmentation de ses tarifs pour l’utilisation professionnelle de Google Maps. Pour ne citer qu’un exemple, le lot de 1000 cartes affichées est passé de 0.5€ à 7€, soit une multiplication par 14 du tarif.

Google n’est pas seul dans ce cas. D’autres entreprises proposent des services gratuits ou au prix inférieur à leur coût de revient dans le but de monopoliser un marché. Twitter a, par exemple, mis plus de 10 ans avant de dégager des bénéfices.

Dumping de service numérique ?

Comme indiqué, la problématique ne réside pas dans le fait de faire payer pour un service, mais dans le fait de réaliser un dumping de leur services numériques, alors même qu’ils sont en position dominante. Cette pratique leur permet de tuer la concurrence sur un marché en transformant des consommateurs qui payent, en utilisateurs qui ne payent pas. Une fois la concurrence disparue, ils effectuent la transformation inverse, d’utilisateurs à consommateurs.

Sous couvert de proposer gratuitement des services en échange des données des utilisateurs, Google réalise une réelle guerre économique afin de conserver son hégémonie sur le marché numérique.

Dans le marché numérique défini par les économies d’échelle et la nécessité d’atteindre une masse critique d’utilisateurs avant rentabilité, l’apparition de nouveaux acteurs concurrentiels devient compliquée. Sur le long terme, les consommateurs sont donc lésés car la concurrence est faible voir inexistante, et les prix sont alors fixés par le détenteur du monopole.

Ce genre d’atteintes à la concurrence ne sont pas passées inaperçues pour la Commission européenne. Cette dernière a condamné Google à plusieurs reprises à payer de fortes amendes, pour un montant total de 8,25 milliards d’euros sur les trois dernière années.

Ces amendes, bien que particulièrement élevées, sont traitées comme un coût de fonctionnement par Google, et ne réparent pas les conséquences des actes délictueux, c’est-à-dire, la création d’un environnement économique stérile. Google conserve alors une position dominante qui lui octroie une croissance forte, lui permettant de rembourser rapidement les accrocs causés par ces amendes.

Les entreprises justifient actuellement le faible coût de certains de leurs produits en indiquant ne vendre en réalité qu’un seul et même produit aux fonctionnalités diverses et ayant un fort niveau d’intégration. Ceci leur permet de s’étendre sur des marchés nouvellement créés, en rachetant ou en copiant la concurrence, et cela sans se soucier des régulations. Le choix des consommateurs se résume alors à quelques prisons dorées, desquelles il est difficile de sortir, et dans lesquelles il est parfois impossible de ne pas entrer, car exigées par les études, le travail, ou les relations sociales.

Une solution serait de forcer ces géants à rendre leurs produits interopérables, en utilisant des protocoles ouverts tels que Matrix pour les communications instantannées ou ActivityPub pour les réseaux sociaux. Ceci permettrait aux consommateurs de s’émanciper et leur octroierait un réel pouvoir de choix.

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